Préface de l’auteur :
« Les pages de cet ouvrage n’ont qu’une prétention, celle de situer le rôle et l’action des Arméniens dans l’histoire de Marseille et surtout dans le mouvement commercial de notre grand port. J’ai apporté à cette tâche ardue toute la documentation qu’il m’a été possible de puiser dans nos archives, en ne basant mon étude que sur des renseignements dûment contrôlés ou appuyés sur des textes indiscutables, éliminant la légende et abrégeant les commentaires fastidieux. Ces faits méritaient d’être spécialement groupés et soulignés, car au XVIIe siècle surtout les Arméniens ont joué sur notre place et dans l’histoire de notre commerce local un rôle de tout premier plan et si ce travail n’avait pas été fait il eût fallu le faire. Je dois remercier tout particulièrement ceux qui ont facilité mes recherches, ce corps admirable de tous nos archivistes, que j’ai appris à connaître et à estimer, M. Fournier, le distingué archiviste en chef et son adjoint, mon ami M. Reynaud, de la Chambre de Commerce, M. Busquet, l’éminent archiviste du département et son sympathique adjoint M. Moulin, MM. Isnard et de Servières, les archivistes de la ville et M. E. Duprat.

Si les Arméniens qui ont été les pionniers du commerce organisé de l’Orient se sont, ainsi que nous le verrons, heurté avec les autorités locales, au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, cela tient à ce qu’alors la notion du libre trafic n’existant pas, tout effort venant de l’étranger était de prime abord instinctivement contrecarré. Richelieu et surtout Colbert, organes du pouvoir central, plaçant l’intérêt général au-dessus des intérêts particuliers, en appelant les négociants arméniens à Marseille et en France, leur ont donné le moyen de se faire connaître et de développer dans notre cité le commerce avec l’Orient, dont on peut dire sans exagération qu’il a alimenté pendant des siècles et notre port et une grande partie de ses habitants. Les négociants arméniens des XVIIe et XVIIIe siècles n’étaient pas de simples trafiquants, mais de puissants personnages représentant un commerce nouveau et parfaitement organisé, depuis les lointains confins de la Perse jusqu’aux Échelles du Levant, d’où ils s’embarquaient avec leurs marchandises pour Marseille et les autres ports d’Europe. Ils ne furent jamais une charge pour notre cité, mais bien à des époques diverses un élément de prospérité.

Aujourd’hui qu’une colonie toute nouvelle et toute différente d’Arméniens, réfugiés de la grande guerre, est venue s’établir à Marseille, où leur nombre dépasse en quelques années celui de toutes les colonies réunies des d’Arméniens de siècles précédents, il importe que ces nouveaux venus sachent aussi suivre les traces de leurs devanciers, en se montrant dignes de l’hospitalité si généreuse que la France leur a accordée, en ne rien oubliant de leurs brillantes origines, mais en songeant également qu’ils doivent suivre dans notre cité, devenue aujourd’hui suffisamment cosmopolite, non pas les voies internationales, où certains pourraient les guider, mais la voie nationale française que le peuple arménien connaît par son sang et sa tradition, cette voie qui, grande ouverte aux étrangers bien nés, ne peut être pour eux que celle qui commence aux Croisades, avec les chefs francs et armé riens alliés, avec leur dernier roi français Léon de Lusignan, qui traversant ensuite la Méditerranée, débouche à Marseille, s’arrête à Verdun un moment et passant sous l’Arc de Triomphe, doit s’étendre maintenant vers un avenir de paix d’abord, sociale et française.
Janvier 1929. »

Notes de recherche :

Tékéian, Licencié en Droit, ancien Commissaire de Marine

Informations sur le livre :

Année 1929
Nombre de pages 72
Editeur Institut Historique de Provence
Ville éditeur Marseille
Format du support 17x26
Type de colume Relié
Mots-clés
Types de travail
Langues
  • Français