Documents administratifs familiaux (collection Dikran Hekimian et Claude Makinadjian)

La collection Dikran HEKIMIAN et Claude MAKINADJIAN a été versée au Fonds de l’Association pour la recherche et l’archivage de la mémoire arménienne (ARAM) en avril 2017.

Dikran HEKIMIAN (1944-1996), et son ami d’enfance Claude MAKINADJIAN, résidant respectivement à La Ciotat (13) et à Aix-en-Provence (13), collectaient tous documents relatifs à l’histoire des Arméniens dans les salles de vente et les marchés de la région dès les années soixante.

Claude MAKINADJIAN par souci de préservation et de diffusion de la mémoire arménienne a versé en avril 2017 une collection rassemblant 65 passeports et actes d’état civil de réfugiés arméniens datant de 1915 à 1929. Celle-ci représente une source historique importante pour l’archivage de la mémoire arménienne du fait qu’elle témoigne des déplacements des nombreux réfugiés contraints à l’exil suite au Génocide des Arméniens et Assyro-Chaldéens de 1915-1917.

Communication et valorisation
La numérisation des pièces (numérisées par Brigitte Balian-Artin) de la collection HEKIMIAN-MAKINADJIAN pour la diffusion en ligne en libre accès permet aux historiens de retracer les trajectoires migratoires de ces exilés. Les renseignements donnés sur leurs lieux de naissance, de résidence, et leurs déplacements répétitifs, font inexorablement penser à une errance mue par la quête d’une nouvelle vie sur une autre terre que celle de leurs origines.

Aussi on y découvre un large éventail de catégories socio-professionnelles (artiste peintre, comédien, expert en tapis, horloger, forgeron, employé, commerçant, cordonnier, cultivateur, …), ainsi que leur situation personnelle et familiale (femme isolée, orphelin, mineur isolé, célibataire, veuf ou veuve avec ou sans enfants, personne âgée, en situation de handicap…).

Par conséquent, ce corpus est un reflet de la réalité intangible d’une centaine de rescapés arméniens du génocide.

La base de données proposée par l’Association pour la recherche et l’archivage de la mémoire arménienne (ARAM) permet d’effectuer des recherches multi-critères dans la base documentaire : vous pouvez classer la liste alphabétiquement par nom, prénom, résidence, adresse en cliquant sur la tête de chaque colonne. Vous pouvez également utiliser la section de recherche par nom.

Présentation des différents acteurs délivrant passeports et visas aux Arméniens au Moyen-Orient dans les années 1920 :

Dans le cadre des migrations forcées comme volontaires des Arméniens depuis l’Empire ottoman puis la Turquie à compter de 1923, les documents de voyage conservés à l’Association pour la recherche et l’archivage de la mémoire arménienne (ARAM) permettent d’entrevoir une kyrielle d’acteurs délivrant ces papiers. Obtenir un passeport et un visa se révéla particulièrement complexe pour de nombreux Arméniens. Dans leurs fuites, peu purent emporter des preuves de leur identité. Or, ces documents étaient essentiels pour constituer un dossier de passeport. De plus, le financement des timbres, notamment pour le visa, força de nombreux Arméniens, dont la majorité avait tout perdu durant le génocide, à économiser des mois durant en travaillant dans les villes où se trouvaient des acteurs officiels aptes à délivrer de tels documents. Enfin, la question du statut des Arméniens, déchus de leur nationalité par des décrets turcs et russes, pose une question nouvelle d’ordre international : que faire d’individus dont aucun Etat ne répond ? Comment leur garantir des droits et une protection ? Ces enjeux multiples auxquels sont confrontés les Arméniens et la multiplicité des acteurs délivrant des documents de voyage dont la reconnaissance est inégale illustrent la complexité de la situation au Moyen-Orient au sortir de la Première Guerre mondiale.
Une première série d’acteurs internationaux entrent en jeu au cours des années d’après-guerre. Présentons tout d’abord les acteurs militaires et notamment l’armée française du Levant. Les militaires français, engagés en Cilicie, assurent la protection des Arméniens rescapés du génocide dans cette région jusqu’en 1921. Si une partie de ces réfugiés s’engageront dans l’armée du Levant et combattront avec les soldats français, la ratification du traité d’Ankara conduit à l’évacuation des forces françaises et d’une partie des Arméniens vers la Syrie-Liban. Cherchant à quitter le Moyen-Orient, certains Arméniens obtiennent un laisser-passer de la part du Général commandant l’armée du Levant. Ce document officiel est notamment recevable pour obtenir un visa vers la France.
La seconde série d’acteurs internationaux concerne les représentants nationaux à l’étranger. Les ambassades, hauts-commissariats et consulats sont en mesure de délivrer des passeports et des visas aux Arméniens pour gagner la France. C’est notamment le cas des représentations officielles de l’éphémère République d’Arménie (1918-1920) qui multiplient les documents de voyage permettant aux Arméniens de quitter le Moyen-Orient.
La troisième et dernière série d’acteurs internationaux concerne les institutions internationales, dans un contexte de structuration mais aussi d’engagement de la Société des Nations (SDN) pour favoriser durablement la paix au niveau international. Plusieurs documents permettent la migration des Arméniens. Outre le passeport, le Bureau International du Travail (BIT) délivre notamment des contrats de travail, permettant ainsi une répartition des Arméniens en fonction des demandes des différents Etats-membres de la SDN tout en garantissant un emploi aux bénéficiaires.
L’apatridie des Arméniens, notamment ceux originaires des territoires turcs du désormais ex-Empire ottoman, est prononcée en 1927 par le gouvernement kémaliste. En Russie, les Arméniens sont apatrides depuis 1921. En réalité, les Arméniens sont privés de leurs droits nationaux en Turquie dès 1924. C’est cette même année que leur est ouvert l’accès au passeport « Nansen », reconnu par trente Etats dont la France, leur permettant une reconnaissance et une protection au niveau international.
D’autres acteurs, nationaux, délivrent des documents officiels permettant aux Arméniens de quitter légalement le territoire dans lequel ils se trouvent. Il s’agit des représentants de l’Empire ottoman puis de la Turquie qui se débarrassent des rescapés du génocide.
Enfin, des acteurs « informels », notamment les autorités religieuses, émettent également des laissez-passer et autres documents attestant de l’identité de son porteur dans l’objectif de lui permettre de quitter le territoire dans lequel il se trouve. Ces documents étaient cependant soumis à l’appréciation des autorités officielles du pays dans lequel souhaitaient se rendre leurs porteurs.
Dans un contexte d’entre-deux-guerres difficile et de tensions au Moyen-Orient, la superposition d’acteurs nationaux, internationaux comme informels délivrant des documents de voyage aux Arméniens rend d’autant plus complexe leurs migrations, soumises à l’appréciation, et plus souvent à la solidarité, d’autorités diverses pour tenter de leur offrir une nouvelle vie loin des territoires qui leur étaient désormais hostiles.

Rédaction de cette note de contexte historique : Thibaut Keutchayan, Marseille – 2019.

Données :

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